Titre Original: Die Schlangengrube und das Pendel
Réalisateur: Harald Reinl.
Année: 1967.
Origine: Allemagne.
Durée: 1H20.
Distribution: Lex Barker, Karin Dor, Christopher Lee, Carl Lange, Vladimir Medar, Christiane Rücker.
L'ARGUMENT: Au XIXème Siècle, le Comte Frederic Regula est emprisonné puis condamné à mort par écartèlement pour avoir torturé et tué douze jeunes femmes dans son château. Avant de mourir, le Comte jure de se venger...
MON AVIS: Fort d'une riche carrière de plus de soixante films, l'autrichien Harald Reinl est surtout connu pour ses films adaptés des romans d'Edgar Wallace et de Karl May, dont la série des Winnetou ainsi que deux films autour du personnage du docteur Mabuse. Mais c'est "le Vampire et le Sang des Vierges" qui restera probablement comme son oeuvre la plus mythique, tout du moins pour les passionnés de cinéma de genre.
Triste destin pour Harald Reinl qui décéda le 9 octobre 1986 à Puerto de la Cruz en Espagne, assassiné par sa femme, l'actrice tchèque Daniela Maria Delis.
Tiré d'une nouvelle d'Egard Poe, "Le Vampire et le sang des vierges" nous narre la terrible vengeance du Comte Regula après avoir été écartelé par ses bourreaux qui assassina 35 ans auparavant 12 vierges innocentes mises en cause de ces mystérieux méfaits, des expériences empruntées pour le compte de l'immortalité.
Mais une diabolique machination minutieusement concoctée depuis des décennies va entrainer nos héros: un faux prêtre, un avocat, une comtesse et sa dame de compagnie dans un labyrinthe de l'horreur. Surtout que parmi ses invités se trouve en fin de compte le fils et la fille des ancêtres responsables de la mort du sinistre Regula.
Dans la lignée des grands films gothiques de l'époque de Roger Corman ou de la célèbre boite de production anglaise la "Hammer Film", "Le Vampire et le sang des vierges", production allemande auréolée de la présence du grand Christopher Lee est un véritable régal pour l'amateur puriste d'ambiances lugubres de temps ancestraux, de décors magnifiques poétiquement morbides et d'une multitude de détails macabres, bizarres, surprenants, déraisonnés, innatendus. Le tout formant une oeuvre proprement atypique, fascinante, diablement plaisante partant d'un principe connu de la vengeance spectrale héritée du "Masque du Démon" de Mario Bava (voir la scène d'intro qui reprend l'idée du masque assorti de longues pointes mis en exergue sur le visage de la victime) mais cette variation inspirée offrira une alternative possédant sa propre identité et personnalité pour ainsi créer un univers baroque peu commun.
Bienvenue dans ces auberges chatoyantes typiquement alsaciennes, ces bourreaux musclés bedonnants sadiques enmitouflés de lourde cagoule, ces villageoises au joues rosées à la poitrine volumineuse, ce coché apeuré fuyant à vive allure sur des chevaux endiablés durant une longue nuit d'épouvante comme cette vision soudaine iréelle d'une traversée échevelée à travers ces arbres désincarnés abritant des pendus ou des hommes nus ensevelis dans l'écorce. Cette forêt mortifaire au trajet interminable nappée de brume nacrée, des vierges nues ensanglantées affalées sur des instruments de torture ingénieux, des reptiles rampants, des volatiles carnassiers et autres mammifaires venus de nulle part, des cachots humides insalubres suintant la mort, des pièges indociles imbriqués sur le sol, dans les murs et bien d'autres surprises encore. Le tout filmé dans une ambiance opâque, joliment photographié par ces teintes colorées variants du rouge au jaune et d'empreint au mauve classieux, perpétuellement accompagné d'une partition musicale étrangement décalée pour un film d'épôque classique ! une raison supplémentaire pour se sentir en terrain inconnu !
En résulte un bijou gothique hors normes influencé par le cinéma anglais et italien fonctionnant à la manière d'un véritable train fantôme où l'on suit avec un plaisir radieux le trajet connu de 4 héros retrouvés embarqués malgré eux dans un immense chateau abrité par les forces du mal où chaque pièce, chaque sombre recoin leur réserveront une surprise supplémentaire sans jamais pouvoir deviner ce qu'il en adviendra. C'est prioritairement ce qu'ils vont subir et rencontrer sur leur chemin carverneux qui fait l'originalité, le caractère insolite de leur fantasque aventure horrifique et les trucages parfois désuets ajoutent encore une poésie supplémentaire à un film déjà bien fourni car débordant de vitalité d'esprit et d'imagination macabre livrés à chaque minute du métrage écoulé. Et ce qui aurait pû devenir un patchwork d'idées grotesques, grand-guignolesques et farfelues se transforme ici en un rêve éveillé (ce que dira l'un des héros à la fin) à la limite du merveilleux, d'une structure miraculeusement concoctée formant un ensemble détonnant, envoûtant, surprenant, traversé de fresques gigantesques et d'images picturales !
Une oeuvre unique qui régale les yeux à répertorier dans les plus belles réussites gothiques du cinéma d'épouvante de l'ancienne école avec en prime une aura de parfum bis qui ne pourra que contenter, voir combler les fans du genre.