Soleil Vert

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Messagepar BRUNO MATEI » 27 Juillet 2011, 09:29

SOLEIL VERT
Titre Original: Soylent Green.
Réalisateur: Richard Fleischer.
Année: 1973.
Origine: U.S.A.
Durée: 1h37.
Distribution: Charlton Heston, Leigh Taylor-Young, Chuck Connors, Joseph Cotten, Brock Peters, Paula Kelly, Edward G. Robinson.

FILMOGRAPHIE: Richard Fleischer est un réalisateur américain né le 8 décembre 1916 à Brooklyn, et décédé le 25 Mars 2006 de causes naturelles.
1952: l'Enigme du Chicago Express, 1954: 20 000 lieux sous les mers, 1955: les Inconnus dans la ville, 1958: les Vikings, 1962: Barabbas, 1966: le Voyage Fantastique, 1967: l'Extravagant Dr Dolittle, 1968: l'Etrangleur de Boston, 1970: Tora, tora, tora, 1971: l'Etrangleur de Rillington Place, 1972: Terreur Aveugle, les Flics ne dorment pas la nuit, 1973: Soleil Vert, 1974: Mr Majestyk, Du sang dans la Poussière, 1975: Mandingo, 1979: Ashanti, 1983: Amityville 3D, 1984: Conan le destructeur, 1985: Kalidor, la légende du talisman, 1989: Call from Space.

Un an après son fiévreux polar réaliste, Les Flics ne dorment pas la nuit, le maître hybride Richard Fleischer se tourne en 1973 vers la science-fiction et empreinte le roman de Harry Harrison pour illustrer l'une des plus effrayantes presciences de notre futur de demain, véritable cri d'alarme sur le sort déchu de notre humanité précaire. Ovationné l'année suivante par son Grand Prix au Festival d'Avoriaz, Soleil Vert se révèle en l'occurrence plus que jamais d'actualité et n'a rien perdu de sa puissance significative.

En 2022, l'avenir du monde est plus que jamais sur la corde raide. Surpopulation, pollution, réchauffement climatique, famines et crise du logement mènent le sort de l'humanité vers une dernière alternative. Le soleil vert, bleu et rouge sont des petites tablettes alimentaires synthétiques à base de plancton pour subvenir au peuple famélique. Mais derrière ce nouveau produit de consommation prolifique se cache un terrible secret. C'est ce que va découvrir au péril de sa vie un flic enquêtant sur la mort équivoque d'un des directeurs de la production nutritionnelle.

Richard Fleischer, en visionnaire défaitiste, nous met irrémédiablement dans l'ambiance pessimiste dès son générique d'intro illustrant de manière croissante (via l'entremise d'images d'archives documentées) le développement industriel des mégalopoles du début du 20è siècle jusqu'à notre civilisation moderne débouchant vers une surpopulation et une pollution en nette dégénérescence. Ce mini clip prophétique est exacerbée par une bande musicale mélancolique de Fred Myrow. Dans une succession d'images vigoureuses de foule humaine engluée dans des cités urbaines insalubres, Soleil Vert démarre fort, inquiète et prend à la gorge le spectateur dérangé d'une situation semblant familière et rationnelle.
Conçu comme une enquête criminelle, la narration linéaire nous amène à suivre l'existence routinière d'un flic nommé Robert Thorn co-habitant avec un vieux retraité du nom de Sol Roth.
Avec une modeste sobriété pour ces décors futuristes high-tech déployés et surtout l'environnement suffocant conçu par des effets-spéciaux minimalistes pour dépeindre un new-york diaphane et suffocant, Richard Fleischer réussit avec une grande efficacité à nous interpeller et émouvoir. Par la frugalité de certaines scènes intimistes d'une justesse naturelle, il faut par exemple décrire la séquence saugrenue où le vieux Sol propose à son fidèle acolyte de redécouvrir les plaisirs culinaires d'antan. Comme le fait de savourer dans une assiette et des couverts d'un autre âge une feuille de salade fraîche, verte et croquante, quelques tomates juteuses et une tranche de boeuf converties en sauce bolognaise et pour terminer la dégustation fruitée d'une pomme bien ferme ! Dans un jeu de regards complices mutuellement cocasses et satiriques, nos deux compères enjoués réussissent à nous faire partager un moment convivial d'une rare banalité s'il n'avait pas été retranscrit dans une époque futuriste en phase d'avilissement. Nous qui sommes quotidiennement sevrés à la surbouffe des rayons de nos hyper marchés et des fast-food expansifs de tous horizons, à tel point que l'obésité est devenu en France un phénomène de société substantiel. Il faut d'ailleurs savoir qu'à l'origine, cette savoureuse séquence dans son émotion attendrie a été simplement improvisée en plein tournage à la demande de Charlton Heston et Edward G. Roberson.
Suite à la mort mystérieuse du directeur de l'industrie alimentaire, Robert Thorn va petit à petit découvrir les véritables raisons qui ont concouru à faire assassiner cet individu notoire alors que le produit synthétique érigé pour la population occulte une épouvantable révélation licencieuse.

Dans un climat suffocant au bord du marasme, rehaussé d'une photographie diaphane aux teintes verdelettes quand il s'agit de brosser l'urbanisation solaire d'une ville en décrépitude, Soleil Vert fait sérieusement froid dans le dos, inconforte et créé durablement le malaise. Le réalisateur plus engagé que jamais dans la préservation de notre environnement nous dévoile ici un avenir caniculaire proprement despotiste, totalement déshumanisé et dictatorial, où la femme battue, dépréciée est comparable à un "mobilier", où les pauvres démunis, affamés et sans emploi sont parqués les uns sur les autres dans les églises ou escaliers d'immeuble pour trouver le sommeil. Quand aux forces de l'ordre sévèrement autoritaires quand il s'agit d'enrayer toute protestation anarchique, elles sont contraintes d'amasser les quidams désoeuvrés et révoltés à l'aide de grue de chantier pour les entasser dans leur réservoir de camion benne. Alors que les riches notables, égocentriques, orgueilleux, éludés de toute empathie humaine ont droit à une vie beaucoup plus autonome, aisée et épanouie dans de vastes pavillons de luxe climatisés et clinquants. La faune et la flore annihilées ne sont plus que des réminiscences radotées par nos ancêtres aigris, davantage tentés par le suicide exutoire toléré par une entreprise mortuaire aux méthodes cyniques éhontées.
Et quand Sol réussit à découvrir l'horrible constituant des tablettes vertes, Richard Fleischer met en scène l'une des séquences d'euthanasie les plus bouleversantes de l'histoire du cinéma. Allongé sur un lit spécialement conçu pour recevoir le témoin volontaire, le vieil homme va observer durant vingt minutes devant la toile d'un gigantesque écran de cinéma panoramique les plus belles merveilles écologiques de notre nature, de notre terre d'antan et de tout ce qui y vivait et existait en paisible harmonie. Une séquence poignante d'une beauté flamboyante scandée par un fond musical de symphonie classique (Beethoven, Tchaïkovsky, Peer Gynt), comparable à une élégie d'une tristesse si lamentée qu'il est difficile de retenir quelques larmes amères.

D'une étonnante frugalité qui force l'admiration dans les moyens techniques mis à disposition pour authentifier un monde futuriste agonisant, Richard Fleischer privilégie autant la tempérance vers la caractérisation de ses personnages forts à l'humanité fléchissante (ou à contrario au profil impassible d'antagonistes véreux et corrompus). Il prime sur l'émotion chétive et mélancolique de leurs souvenirs d'antan, quand notre civilisation tolérante savait encore discerner la signification morale de la dignité humaine. Effroyablement crédible dans son univers poisseux dépeint avec réalisme cafardeux, ce chef-d'oeuvre avant-gardiste est l'un des plus sombres et effrayants constats sur notre société contemporaine avide de cupidité et d'hyper consommation. Un témoignage alarmiste tristement actuel, en espérant ne jamais subir un jour prochain la rigidité d'une situation aussi nihiliste pour les générations à venir. Où l'asservissement de homme cannibale se repaît de la chair humaine du défunt pour subvenir à ses besoins nutritionnels.

Note: Edward G. Robinson, qui venait de clôturer son 101ème dernier film mourut en janvier 1973 (rongé par un cancer), peu après la fin du tournage, alors que Soleil vert n'avait pas encore été présenté au public.
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BRUNO MATEI
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Messagepar Forensick » 27 Juillet 2011, 13:35

Très bon !
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Messagepar lirandel » 27 Juillet 2011, 18:38

pas mieux :P
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Messagepar Oh My Gore » 28 Juillet 2011, 17:37

Un super film que je regarde toujours avec autant de plaisir !!
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