SHIVER (ESKALOFRIO) de Isidro Ortiz. 2007. Espagne. 1H31. Avec Junio Valverde, Mar Sodupe, Francesc Orella.
L'argument: Santi, un adolescent de 16 ans, est atteint d'une maladie qui le rend très sensible à la lumière. Avec sa mère, ils quitte donc Barcelone pour s'installer au Nord de l'Espagne. Mais bientôt des phénomènes étranges se produisent dans les bois situés à proximité de la demeure...
Mon avis: Seconde réalisation de l'espagnol Isidro Ortiz après l'intéressant "Fausto 5.0" en 2001 (primé à Gérardmer), "Eskalofrio" est un étonnant petit film fantastique enthousiasmant qui doit beaucoup à sa réalisation sensitive au plus près des personnages et de ces décors forestiers participant de manière réaliste à l'action, son scénario intéressant jouant habilement avec la peur de la découverte (même s'il n'inventera rien) et un sens du suspense remarquablement structuré ne lachant jamais prise sur l'intérêt du spectateur.
La trame est limpide: quelques moutons sont régulièrement retrouvés égorgés et vidés de leur sang dans une région campagnarde et forestière au Nord de l'Espagne. Une mère et son fils installés depuis peu dans la région vont être le témoin d'horribles évènements qui iront incriminer le jeune garçon souffrant par ailleurs d'une maladie rare le rendant très sensible à la vue de la lumière et en priorité face à l'élément naturel de la couleur rayonnante et chaude du soleil. Un point commun qui sera vite juxtaposé au comportement nocturne du meurtrier.
On s'imagine alors qu'à partir de ce canevas simpliste plutôt orthodoxe, un loup pourrait être la cause de cette série d'évènements dramatiques, à moins d'avoir à faire à un bon gros loup-garou ou une horrible créature monstrueuse venue des limbes de l'enfer !
Que nenni ! l'intrigue sera plus subtile qu'elle n'y parait et laissera place à un vrai drame familial enfoui dans de lourds secrets dont seuls quelques habitants des alentours possèdent la clef !
Et le réalisateur de nous mener par la main dans un récit angoissant, parfois terrifiant mené avec savoir-faire dans l'art d'inquiéter et de fasciner, prenant son temps à nous attacher à ces personnages principaux, relevés d'une belle épaisseur psychologique auquel on s'identifie facilement.
Des personnages humains doués de fragilité, déconcertés et angoissés d'être pris dans l'engrenage d'une machine infernale ou chacun essaiera tant bien que mal de mener sa propre enquête.
Ce qui rendra la tournure de la narration convaincante et imbriquée, le spectateur tout à tour intrigué et pris dans la recherche de la vérité, participant pleinement à l'action du film.
Le rythme constant conduit comme une aventure horrifique ne faiblit jamais, la réalisation prenant également un soin particulier à filmer le climat de la nature chargée d'une somptueuse photographie aux nuances de vert humide pour l'environnement naturel hostile et de blanc naturel pour la couleur du ciel, des horizons lointaines et des pâles visages humains à la recherche perpétuelle de la véracité entre deux séquences chocs. Il y a d'ailleurs un moment magistral de virtuosité technique à souligner quand elle fait place entre la victime et le meurtrier, réunis au même endroit dans une chambre ou chacun essaiera de s'entrevoir. La victime allongée dans son lit, tétanisée de peur, suintante de gouttes de sueur nous retransmet à merveille l'effet de peur et de panique face à une situation aussi mortelle et insolite renforcée par l'apparence monstrueuse et affolante du meurtrier ! les nombreux angles de prises de vue étudiés sur les visages filmés en gros plan ajoutent une belle pression d'intense terreur au spectateur !
Le final ou la tension devient plus oppressante dévoilera toute l'énigme et ajoutera un supplément d'âme à teneur dramatique où les monstres ne sont pas ceux que l'on croit et où les humains ont encore une belle part honteuse de responsabilité.
Encore un excellent film fantastique racé venu de l'Espagne qui possède le véritable art de nous intriguer avec un récit efficace et haletant ne perdant jamais de vu ses personnages complices. Un scénario ancré près des légendes urbaines ou de ses fameux contes cruels que l'on aimait parfois se raconter le soir avant d'aller dormir.