Paper House

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Messagepar BRUNO MATEI » 04 Février 2011, 15:59

PAPER HOUSE
(la maison de papier)
Réalisateur: Bernard Rose.
Année: 1988.
Origine: Angleterre.
Durée: 1H32.
Distribution: Jones Gemma, Burke Charlotte, Spears Elliot, Headly Glenne, Newbold Sarah.

FILMOGRAPHIE: Bernard Rose est un réalisateur, scénariste, acteur, directeur de la photographie et monteur britannique. Il est né à Londres le 4 août 1960.
1987 Body contact, 1988 Paperhouse, 1990 Chicago Joe and the Showgirl, 1992 Candyman, 1994 Ludwig van B. (Immortal Beloved),1997 Anna Karénine, 2000 Ivans xtc., 2008 The Kreutzer Sonata, 2010 Mr Nice.

Les années 80 furent une source d'inspiration en ce qui concerne la thématique du rêve étroitement liés à notre psyché, sans savoir ce qu'il en est quand à leur véritable origine !
Dream Lover, La Compagnie des loups, Dreamscape, Bad Dreams, l'Avion de l'apocalypse (non, j'déconne !) ou encore Les Griffes de la Nuit restent les exemples les plus représentatifs en terme d'univers troubles et fantasques, laissant parfois place à un florilège de séquences inventives accordées par la magie des effets-spéciaux.
Mais dans ce lot de productions variées qui auront marqué cette décennie déférente, on a aujourd'hui tendance à oublier que le réalisateur Bernard Rose réalisa en 1988 (4 ans avant son génial Candyman) une perle du fantastique contemporain illustrant le portrait établi d'une fillette perturbée par un rêve récurrent mis en cause par l'absence paternelle.

Anna est une petite fille impertinente qui va souffler ses 11 bougies d'anniversaire. Son insolence et son caractère irascible lui vaudra d'être expulsé d'un cours par sa professeur autoritaire. Réfugiée dans le couloir et flânant dans l'ennui, elle va subitement s'endormir et se mettre à rêver d'une maison qu'elle avait dessiné auparavant sur une feuille de papier durant un cours.
De manière continuelle, elle va se retrouver projeté dans son monde résultant de son activité psychique après avoir dessiné dans la réalité davantage de détails mis en exergue sur sa feuille de papier. De manière à pouvoir s'approprier davantage d'éléments matériels pour les retrouver réunis dans ses rêves et créer ainsi sa propre vie imaginaire en instance d'évolution.
Elle va fugacement faire la connaissance d'un jeune garçon qu'elle avait instinctivement dessiné mais qui sera malencontreusement paralysé des jambes. Bientôt, d'étranges évènements ne vont pas tarder à perturber la vie fantasmée des deux jeunes enfants réunis à l'intérieur de la maison de papier, davantage épris d'affection l'un pour l'autre.


Difficile de résumer la trame d'un scénario aussi atypique que Paper house, oeuvre intimiste touchante et poétique, autant que cauchemardesque, voire parfois terrifiante, établissant une introspection sur le monde de l'enfance et son innocence perturbée.
La réussite de ce script singulier juxtapose avec intelligence poésie prude et émotion infantile sans céder aux effets-spéciaux ludiques. Un miroir déformant qui imbrique le rêve et la réalité au point de les fusionner communément pour finalement nous faire douter de la part du réel et du fictif. Une ambivalence allouée autant pour l'héroïne que celui du spectateur sceptique de la rationalité des faits imagés.
Surtout que le final surprenant et salvateur laisse présager que le rêve s'est potentiellement matérialisé pour pouvoir s'approprier de notre réalité. A moins que tout ceci n'était qu'un fantasme escompté de l'esprit troublé d'Anna car nous sommes également conscients que les origines de son rêve se rapporte sans doute à la conséquence subconsciente d'une absence parentale. D'un père souvent occupé par sa profession exercée à l'étranger, venant à peine de se remettre d'un sevrage d'alcoolémie. Dès lors, Anna, rêveuse et fantasque va s'inventer son propre foyer en compagnie d'un garçon (alors que la praticienne de la fillette avait évoqué l'existence de cet enfant dans la vraie vie) auquel elle tombera amoureuse mais dont l'apparence spectrale d'un père interlope va empiéter leur relation pour étrangement se manifester aux abords de la maison.
Le problème avec ces rêves extrêmement sensoriels c'est qu'ils vont se répercuter sur la santé fragilisée de la fillette et qu'elle semble donc courir un vrai danger dans la propre réalité rationnelle .
La continuité du récit va davantage s'assombrir dans un univers opaque quand Anna aura gribouiller de manière colérique son dessin et que l'état de santé du jeune garçon va considérablement se désagréger (comme le garçon gravement malade du monde réel que le médecin s'empresse de soigner).

Avec son apparence frivole de garçon manqué, Charlotte Burke incarne avec une belle innocence fragile et un sens naturel la jeune Anna du haut de ses 11 ans. Une fillette insolente et téméraire, persuadée d'avoir créer un véritable monde réel par le biais d'un rêve hermétique. Elle se révèle étonnamment communicative et extravertie dans ses désirs fantasques, particulièrement touchante et empathique quand à son idylle naissante avec un jeune garçon paradoxal (Elliot Spears, tout aussi tempéré dans son interprétation délicate).

De ce récit passionnant et hors norme, Bernard Rose en tire un des plus beaux films fantastiques des années 80, soutenue par une gracile partition musicale de Hanz Zimmer toute en douceur mélancolique .
Avec peu de moyens, sans aucun effet spectaculaire mais par la poésie de décors et paysages naturels particulièrement soignés, baroques et inquiétants (la maison difforme et expressionniste, le phare au beau milieu d'une plaine verdoyante et l'imagerie ciselée en ombre chinoise de l'inconnu surveillant la demeure en pleine nuit), Paper House titille l'imagination du spectateur avec subtilité et un sens immersif s'imposant à notre esprit songeur dans un univers austère sans identité.
Sans savoir si au final, tout ceci n'était que la psychanalyse suggérée d'un enfant torturé par le biais du rêve exutoire ou à contrario s'il s'agissait véritablement d'un conte fantastique aux univers parallèles, en constante instance de jonction.
Quoiqu'il en soit, Paper House reste une perle précieuse en demi-teinte, à la frontière du rêve et du cauchemar, qui touche et interpelle de manière sensible la part d'enfance et de candeur qui est restée enfouie en chacun de nous.


Récompenses: Corbeau d'Or au BIFFF 1989
Grand Prix de l'étrange à Avoriaz, 1989.
Prix de la Meilleure actrice (Charlotte Burke) et Prix spécial du jury à Fantasporto en 1989
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BRUNO MATEI
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