LA NUIT DE LA METAMORPHOSE (Izbavitelj / The Rat Savior)
Réalisateur: Krsto Papic.
Année: 1976.
Origine: Yougoslavie.
Durée: 1H13.
Distribution: Ivica Vidovic, Mirjana Majurec, Relja Basic, Fabijan Sovagovic, Ilija Ivezic.
POINT DE VUE ADMIRATIF: Krsto Papic est un metteur en scène yougoslave né le 7 décembre 1933 responsable de 22 longs-métrages réalisés entre 1967 et 2003 !
En France, La nuit de la métamorphose aura eu l'opportunité de sortir en salles seulement 5 ans plus tard, plus exactement le 21 Janvier 1981.
En 1930, un jeune romancier auteur d'un récit fantastique anti-conformiste que personne ne souhaite éditer est expulsé de son domicile faute de ne plus pouvoir verser son loyer.
Livré à lui même et sans le sou il se réfugie grâce à l'aide d'un ami empathique dans les souterrains d'une banque désaffectée. Il va alors faire la rencontre impromptue d'une société nouvelle corrompue dans l'indocilité carnassière !
Récompensé de la Licorne d'or et du prix du Meilleur Scénario au festival du film fantastique de Paris au grand Rex, ainsi que le Grand Prix au festival de Trieste, "La Nuit de la Métamorphose" est un objet filmique rare et précieux tant il s'évertue à rendre crédible avec un rare sentiment de véracité un argument fantastique de premier choix !
Et si une communauté d'êtres humains étaient devenus des rats !!! si derrière leur apparence humaine et trompeuse se cachait des êtres monstrueux métamorphosés en rongeurs désincarnés dont leur seul but n'est que domination, arrivisme, contrôle et pouvoir sur une société en état de crise, réduit à la famine et la précarité. Derrière cette narration fantastique fascinante et passionnante se profile une parabole politique sur les régimes extrêmistes, les dictatures fascisantes à l'aube de la progression du Nazisme commandité par Hitler (nous sommes en 1930).
L'incroyable force du récit digne d'intérêt social est aussi de réussir à nous convaincre à la retranscription d'un univers cauchemardesque dans une sombre atmosphère expressioniste.
Renforcé par une reconstitution historique fidèlement établie dans cette époque révolue ou régissent des humains rats réunis la nuit pour des banquets dépravés où se mêlent bouffe, baise et beuveries sur un air musical festif académique ! La jouissance de l'insouciance, l'égoisme primaire, la liberté débauchée face à une population tributaire davantage contrôlée par un maire perfide qui ne souhaite qu'à accéder au pouvoir et la richesse financière.
Durant tout le film nous allons suivre le cheminement de notre héros contestataire témoin de cette stupéfiante découverte qui ira s'associer avec un professeur ambitieux d'avoir réussi à créer un sérum pour éradiquer ses monstres humains qui ont la faculté de dédoubler leur proie après les avoir mordu. Ce qui pourrait évoquer aux amateurs puristes le film de Don Siegel: l'invasion des profanateurs de sépulture.
Un combat sans merci et désespéré va alors s'engager entre notre romancier et le professeur auquel les rats ont juré d'avoir sa tête !
Le récit est dense, admirablement mené, constamment inquiétant et surtout habité par une ambiance mortifère ou plane un sentiment d'insécurité omniprésent envers chaque citoyen qui semble suspect d'une potentielle substitution à cette nouvelle race d'êtres humains endoctrinées par un chef totalitaire.
Le final profondément nihiliste et désespéré nous plonge davantage dans l'amertume désanchantée ou notre héros va sombrer dans une remise en doute dramatique à cause d'une fatale erreur humaine.
Où les riches auront toujours leur dernier mot à dire quand le nouveau sauveur des rats attendra une prochaine crise sociale pour mieux berner et lapider de leur droit commun les insoumis et les proscrits.
Il faut souligner la simplicité des trucages pour tenter d'authentifier ces rats humains souvent emmitouflés dans des vêtements noirs et lugubres. Une apparence humaine repoussante comme si l'on pouvait renifler l'odeur de la vermine avec leurs petits yeux crapuleux, un visage grisonnant impropre, légèrement velu et leurs petites dents pointues pourrissantes. Des maquillages futiles mais très efficaces dans leur aspect crédible réellement inquiétant.
Il y a une scène que j'aimerai relever, la plus impressionnante du film quand l'un des protagonistes va être "traité" de manière radicale dans une cellule infestée de rats qui iront le mordiller. Tentant de se débattre de cette attaque multiple en estocade, d'incessants hurlements rendus par la pauvre victime se font alors échos ! Glaçant !
Justement ovationné à son époque dans divers festivals, "La Nuit de la métamorphose" n'est pas exempt de défauts à cause de dialogues pas très aboutis, un montage fébrile (à moins d'avoir vu une version expurgée), certaines naivetés et facilités scénaristiques mais il reste une fable fascinante totalement pénétrante, authentifiée par une ambiance de cauchemar atypique et interprété avec conviction par des comédiens inconnus chez nous.
Mais c'est aussi autant une charge sociale contre toute forme de dictature politique qui se noie avec complaisance dans le mensonge et la manipulation dépouillant les masses populaires pour les démunir de leurs biens et droit civique.
Une splendide curiosité inavouée dans l'oubli à ne manquer sous aucun prétexte !
Note perso: Grâce à ce film j'ai enfin pû divulguer la véritable identité de Sarko !!! ou plus implicitement: Sarko !!! on t'as r'connu !!!
. Licorne d'or et du prix du Meilleur Scénario au festival du film fantastique de Paris au grand Rex.
. Grand Prix du festival du film fantastique de Trieste