Titre d'origine: Escape From New-York
Réalisateur: John Carpenter
Année: 1981
Origine: U.S.A
Durée: 1h39.
Distribution: Kurt Russel, Lee Van Cleef, Donald Pleasance, Ernest Borgnine, Isaac Hayes, Harry Dean Stanton, Adrienne Barbeau, Tom Atkins, Charles Cyphers, Jamie Lee Curtis.
Sortie salles France: 24 Juin 1981. U.S: 10 Juillet 1981
FILMOGRAPHIE: John Howard Carpenter est un réalisateur, acteur, scénariste, monteur, compositeur et producteur de film américain né le 16 janvier 1948 à Carthage (État de New York, États-Unis).
1974 : Dark Star, 1976 : Assaut, 1978 : Halloween, la nuit des masques 1980 : Fog, 1981 : New York 1997, 1982 : The Thing, 1983 : Christine, 1984 : Starman, 1986 : Les Aventures de Jack Burton dans les griffes du Mandarin, 1987 : Prince des ténèbres 1988 : Invasion Los Angeles, 1992 : Les Aventures d'un homme invisible, 1995 : L'Antre de la folie, 1995 : Le Village des damnés, 1996 : Los Angeles 2013 1998 : Vampires, 2001 : Ghosts of Mars 2010 : The Ward
Quintessence du cinéma d'anticipation des années 80 au succès commercial inespéré (25,2 millions de dollars de recettes rien qu'aux Etats-Unis pour un budget négocié à 6 millions de dollars !), New-York 1997 fait parti de ses réussites aléatoires que les français n'ont pas non plus manqué de célébrer (1,27 millions d'entrées dans les salles !). Au total, le chef-d'oeuvre de Carpenter engrange à travers le monde plus de 50 millions de dollars de bénéfice. Aussi essentiel que le post-nuke Mad-Max 2 ou l'oeuvre matricielle Terminator, New-York 1997 prend pourtant le contre-pied de ces blockbusters novateurs en privilégiant l'ambiance crépusculaire d'un New-York dévasté au lieu de surenchérir l'action explosive. Avec son budget modeste de série B, John Carpenter accomplit ici de véritables prouesses pour transcender la déliquescence urbaine d'une île de Manhattan livrée aux pires criminels des Etats-Unis. Avec peu de moyens, un tournage restreint de 3 mois et l'autorisation de filmer dans une cité urbaine préalablement incendiée (la ville de Saint-Louis), le réalisateur harmonise son ambiance apocalyptique, créé des images saisissantes dans l'esthétisme d'une nuit azur particulièrement feutrée. Ruelles désertes jonchées de débris et détritus, commerces dévastés, épave d'un avion accidenté, amphithéâtre abdiqué, palais transformé en arène de gladiateurs... Le climat anxiogène rendu palpable en interne de ce gigantesque pénitencier est immédiatement immersif chez le spectateur transi de fascination. Alors qu'un sentiment d'insécurité sous-jacent est perçu par quelques silhouettes humaines déboulant tous azimuts au moindre bruit suspicieux. Des ethnies de barbares et de punks tributaires d'un leader sans vergogne s'extirpent de leur cachette pour ne sortir que la nuit, alors que des cannibales sanguinaires s'évacuent des bouches d'égout pour tenter d'appréhender le moindre pèlerin.
Au milieu de ce chaos crépusculaire, un ancien vétéran notoire reconverti dans l'illégalité a pour mission de récupérer le président des Etats-Unis. Ce dirigeant politique est malencontreusement tombé sous l'allégeance du duc de New-York, après que son avion se soit écrasé sur un immeuble par la cause d'activistes opiniâtres. Afin de gagner une remise en liberté, le criminel Snake Plissken bénéficie de 24 heures pour retrouver le président en vie ainsi qu'une cassette audio impliquant une allocution politique d'une grande importance. En prime, et pour intensifier l'enjeu capital, une capsule explosive a été injectée dans les artères de Plissken afin de le dissuader de s'exiler vers le Canada !
A travers ce canevas alléchant et captivant, John Carpenter transforme son récit d'anticipation apocalyptique en bande dessinée flamboyante par sa richesse formelle de décors urbains décharnés et du profil haut en couleurs de personnages fourbes. Puisqu'au cheminement de cette mission jalonnée de rencontres délétères, Snake va devoir collaborer avec un chauffeur de taxi, un ancien comparse déserteur et une catin pour tenter de récupérer le président. En intermittence, quelques péripéties explosives (traques haletantes à travers ruelles malfamées, courses-poursuites en voiture, confrontation d'un duo de gladiateurs dans un ring) et un suspense progressif (un compte à rebours vers une mort certaine est décompté sur la montre de Plissken) viennent scander cette mission périlleuse.
Outre la densité impartie à une galerie de personnages contestataires, Kurt Russel institue avec une aisance innée le nouvel archétype futuriste de l'anti-héros pugnace. Dans celui d'un anarchiste borgne et égocentrique, Snake Plissken constitue l'icone pourfendeur d'une société despotique incapable de réprimer une criminalité en recrudescence. Alors qu'au cours de ces vicissitudes, John Carpenter ne va pas hésiter à railler et brimer la caricature d'un président couard (perruque blonde à l'appui !), constamment ridiculisé par ses anciens prolétaires.
Soutenu par la musique planante composée par Carpenter et son binôme Alan Howarth, New-York 1997 est l'oeuvre emblématique de l'anticipation pessimiste consacrée au divertissement ludique. Ce diamant noir avant-gardiste énonce par ailleurs avec quelques décennies d'avance un discours caustique sur la montée de la criminalité et l'intransigeance d'une présidence impérialiste. Dupliqué à toutes les sauces par nos voisins transalpins mais jamais égalé, New-York 1997 est notamment un modèle de rigueur et suggestion afin de transcender avec économie de moyens une ambiance nocturne aussi envoûtante qu'attractive.