May

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Messagepar SUSPIRIA » 15 Juin 2010, 09:27

Première réalisation et premier coup d'éclat pour un nouveau jeune réalisateur passionné par le genre horrifique dans sa généralité, "May" n'aura laissé personne indifférent lors de sa discrète sortie en salles, du moins pour les vrais amateurs de découvertes au parfum de séduction venimeux dû en priorité à l'interprétation innée d'Angela Bettis interprétant le rôle fébrile d'un bout de femme écorchée, violemment rejetée, mis à écart par son entourage formaté, conventionné dans l'apparence physique plutôt que de tenter de s'attarder sur le caractère humain des rencontres des autres.

"May" est une jeune infirmière exerçant pour le compte d'un cabinet vétérinaire. Timide, refoulée et réservée dès sa plus tendre enfance à cause d'un léger strabisme et d'une mère antipathique un peu trop fière et orgueilleuse, "May" n'a pour seule compagnie affective qu'une simple poupée de cire sous emprise, baroque et rigide, le regard vide et glacé, embrigadée dans une boite de verre à qui elle se livrera de façon journalière ses émotions, ses états-d'âme, ses désirs, ses envies mais aussi ses colères et ses prises de haine.
L'envie de partager son enthousiasme soudain comme par exemple celui de vouloir rencontrer le prince charmant comme on peut l'imaginer dans les livres de contes de fée ou celui de s'intéresser à de jeunes enfants aveugles handicapés par la visualité de pouvoir l'observer. Mais l'égoisme d'une société primaire qui mise tout sur la forme et l'enveloppe physique plutôt que le fond de l'âme et de son contenu va conduire "May" à se livrer malgré elle à une descente aux enfers irréversible dans la perte identitaire, dans son refoulement à extérioriser, sa névrose à exacerber son inépuisable envie d'aimer et d'être aimer par le sang des égoistes à travers le crime frauduleux.

Lucky Mc Kee nous livre avec sensibilité et subtilité une mise en scène virtuose particulièrement inventive, maitrisée, charnelle dans ce portrait poignant, douloureux, intense d'une jeune femme livrée à elle même dans sa fragilité esseulée, son apparente excentricité qui fait que dans ce monde superficiel tout ce qui diffère dérange la supposée normalité.
Le rejet d'un homme séduit mais effrayé par cette anormalité soudaine et dérangée puis la chute accidentelle d'une boite en verre renfermant sa meilleure amie inerte déclencheront la révolte meurtrière de "May" plongée dans une profonde douleur intérieure et physique jusqu'à s'en crever un oeil de l'intérieur pour l'offrir à sa muse aveugle. Car fermement décidée à se créer par elle-même son propre ami de coeur en compilant des bouts de cadavres unis un à un, divers membres variés entrelacés pour les recoller ensuite puis former un pantin de chair morte comparable au monstre de Frankenstein.

L'atypique Angella Bettis crève l'écran dans le rôle de "May". Elle se révèle sidérante de vérité retranscrite, d'émotion cristalline dans sa composition schyzophrène et sensorielle. Un rôle tout en demi-teinte car de prime abord pétillante de timidité amoureuse, de séduction malicieuse dans l'aspect filiforme de ce petit corps aussi mince que frivole, pour ensuite adopter un ton plus obscur, une tenue plus ferme et méthodique, acte méticuleux d'épouvante meurtrière particulièrement habile dans l'art et la manière de tuer de manière chirurgicale et sensuelle sa prochaine victime prise en estocade. Un rôle complètement habité où l'on imagine mal quelle autre comédienne aurait pû s'y mesurer.

Tout en étant un hommage affectueux et sincère au cinéma d'horreur classique et contemporain (James Whales et Dario Argento pour les citer prioritairement), réalisé avec brio et tempérament, "May" est une perle noire d'une beauté macabre singulière, une touchante et poignante histoire d'une femme écrasée par le poids de la formalité autoritaire, conventionnelle et conformiste. Le destin profondément tragique d'une poupée de chair consumée et vidée de toute substance morale dont l'unique but n'était que l'épanouissement dans les mains d'un possible rédempteur mais dont l'issue nuisible ne s'épousera que dans le sang et les larmes.
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Messagepar Butcher » 17 Juin 2010, 23:11

J'avais acheté ce film tout a fais par hasard, sans en avoir entendu parlé avant, et j'avoue avoir été très agréablement surpris par ce petit film sans prétention, mais O combien digne d'intérêt, ne serait ce que par son ambiance et le fait de mélangé poésie avec horreur.
Excellent.

8/10
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Messagepar GladSlayer » 23 Avril 2011, 18:54

Ma dernière claque en date.

L'histoire est captivante, étrange, surprenante.

À voir absolument.
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Messagepar Mindy Clarke » 05 Mai 2011, 12:03

bah au final il se trouve dans mon top 3 tout films confondu...
Un des rares films que j'ai dans la peau... En plus c'est David Doukhan qui m'a offert ce dvd y'a peut être bien 6 ou 7ans, en me disant "tu me fais penser à elle", "mais j'espere que tu ne finiras pas comme elle" :D :D
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Messagepar BRUNO MATEI » 25 Octobre 2011, 15:04

Première réalisation et coup d'éclat formel pour un novice cinéaste passionné par le genre horrifique épuré, May n'aura laissé personne indifférent lors de sa discrète sortie en salles. Du moins pour les vrais initiés de perle noire désenchantée dû en priorité au magnétisme sensuel d'une actrice débutante, Angela Bettis. Une interprétation à fleur de peau d'un petit bout de femme écorchée, violemment rejetée, mis à l'écart de son entourage formaté, faute d'une démographie conventionnée dans l'apparence corporelle plutôt que de s'attarder sur l'humanité ébranlée des âmes candides.

May est une jeune infirmière introvertie employée dans un cabinet vétérinaire. Esseulée, timorée et refoulée dès sa plus tendre enfance à cause d'un léger strabisme et d'une mère dédaigneuse, elle n'a que pour seule compagnie affective l'expression stérile d'une simple poupée de cire, baroque et monolithique. Une figurine spectrale à la physionomie blafarde, embrigadée dans une boite de verre auquel May va confesser de façon récurrente ses états-d'âme, ses désirs, ses envies mais aussi ses brusques éclats de colère alimentés par une haine rancunière exhalée.
Livrant sa bonhomie à de jeunes enfants handicapés par la cécité de ne pouvoir l'observer, sa vie va soudainement basculer quand elle rencontre au hasard des citadins le prince charmant tant convoité dans les contes de fée Mais l'égoïsme d'une société primaire privilégiant l'esthétisme de l'apparence plutôt que l'âme intrinsèque de chaque individu en quête de légitimité, May va s'engager dans une irréversible descente aux enfers mortuaire. Une perte identitaire dépréciée par sa névrose en chute libre va inexorablement exacerber ce sentiment déchu d'être à nouveau rejetée par un monde individualiste et finalement se lancer dans une sanglante dérive autodestructrice.

Lucky Mc Kee nous livre avec une sensibilité empathique une mise en scène alambiquée inventive et maîtrisée, transcendant le portrait poignant, douloureusement cruel d'une jeune adulescente livrée à elle même. Le profil aigri d'une fragilité toujours plus esseulée, son apparente excentricité qui fait que dans ce monde superficiel tout ce qui diffère de la norme se réfute à la différence et l'anticonformisme.
Le rejet d'un homme séduit mais effrayé par cette anormalité rebutante puis la chute accidentelle d'une boite de verre isolant sa meilleure amie mutique vont déclencher la révolte meurtrière de May. Une femme utopiste tentant à peine de s'extravertir dans une relation idyllique naissante mais de nouveau plongée dans une abrupte détresse affective jusqu'à s'y infliger une mutilation en se transperçant un organe oculaire. Dans sa rancoeur humiliée, elle décide donc de confectionner elle même son amour éperdu en compilant des bouts de cadavres unifiés un à un afin de cristalliser un pantin de chair exsangue comparable au monstre de Frankenstein.

L'actrice gracile Angella Bettis crève l'écran dans sa prestance baroque et schizophrène. Elle se délivre corps et âme dans une émotion sensitive pour un rôle en demi-teinte d'une femme pétillante de timidité attendrie, de séduction docilement lascive dans son petit corps filiforme. Ce n'est qu'au fil assombri du récit que l'amante vindicative va adopter un comportement plus obscur et ombrageux, culminant son funèbre destin dans le crime méthodique. Dans l'art macabre et la manière d'assassiner de manière chirurgicale sa prochaine victime prise en estocade. Un rôle désincarné complètement habité où l'on imagine mal quelle autre comédienne ténue aurait pu s'y mesurer avec autant de vérité.

Réalisé avec brio et autonomie, hommage affectueux et sincère au cinéma d'horreur traditionnel et contemporain hérité des thématiques de James Whales et Dario Argento, May est une perle noire d'une beauté macabre singulière dans son ambiance élégiaque. Le portrait acéré et poignant d'une femme désabusée par une défaite sentimentale mais surtout écrasée par le poids d'une société sournoise engluée dans la conformité et les conventions. Le destin funeste profondément opaque d'une poupée de chair consumée et vidée de toute éthique dont l'unique foi n'était que l'épanouissement dans les "mains" d'un potentiel amant extravagant, mais dont l'issue irréversible ne s'épousera que dans les larmes de sang.
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