Le réalisateur italien se décide avec cette oeuvre à ranger les trois quarts de son Gore outrancier dans le placard, afin de privilégier une atmosphère emprunte de fantastique ésotérique déjà quelque peu intrinsèque à des films comme
La maison près du cimetière,
L'au-delà ou encore
Frayeurs.
Entamé en un curieux prologue se déroulant en haute-Egypte, dans lequel un archéologue trop curieux, accompagné de son épouse et de sa fille, perdra momentanément la vue, c'est pourtant en plein New York que se déroule la véritable trame scénaristique de ce
Manhattan Baby.
Le script, écrit par
Dardano Sacchetti, repose progressivement sur une histoire de possession infantile (en l'occurence, la fille de l'archéologue, victime d'un sortilège maléfique) un peu à la manière de
L'exorciste, mais avec une ambiance à la
Poltergeist.
Manhattan Baby, c'est également le chant du cygne d'un
Fulci au sommet de son art et de ses moyens. Parfois superbement filmée (cf. les plans subjectifs au sol précédants l'attaque du serpent venimeux), dotée d'une photographie léchée et de beaux décors intérieurs, cette quarante-et-unième réalisation du
maestro, brillante si elle en est, n'échappe pas moins au traitement de faveur du compositeur
Fabio Frizzi, qui, bien que réutilisant certaines de ses créations musicales majeures et antérieures, signe ici peut-être son morceau le plus splendide:
Baby Sequenza 4, dont on entend l'intégralité lors du générique de fin; une composition synthétique d'une intensité exceptionnelle, entêtante et romanesque à souhait, susceptible de vous trotter durablement dans la tête.
Ce qui ne sied pas à tout le monde, dans
Manhattan Baby (
La malédiction du Pharaon en VF), c'est formellement le rythme particulièrement lent le caractérisant, qui en a fait dérouter les yeux de plus d'un; un bon prétexte (et sans doute le seul) accordé à ces derniers pour crier à la pure et simple médiocrité. Mais ce n'est pas parce qu'un film adopte un tempo contemplatif qu'il doit obligatoirement se révéler médiocre, ô que non. Troublant, feutré, malsain, angoissant, voire quelquefois même terrifiant,
Manhattan Baby s'avère un authentique film fantastique d'ambiance « à lancienne », confer en l'occurence les années 80, que seul un assaut final assez impressionnant, mettant en scène une horde d'oiseaux empaillés s'inanimant et se retournant contre leur taxidermiste en lui déchiquetant le faciès dans des flots d'hémoglobine, viendra en chambouler le ton relativement "adulte".
Foncièrement mésestimé par l'unanimité,
Manhattan Baby se présente comme l'une des réussites majeures de
Lucio Fulci, misant la grande part de son sel dans la profondeur atmosphérique. Un très bon film.
9/10