Oh My Gore ! - Forum

[BRUNO MATEI]

LA MAIN DU CAUCHEMAR.
Titre Original: The Hand
Réalisateur: Oliver Stone.
Année: 1981.
Origine: U.S.A.
Durée: 1h48.
Distribution: Michael Caine, Andrea Marcovicci, Bruce McGill, Annie McEnroe, Viveca Lindfors.

Sortie en salles U.S. le 24 Avril 1981.

FILMOGRAPHIE: Oliver Stone (William Oliver Stone) est un réalisateur, scénariste et producteur américain né le 15 septembre 1946 à New-York.
1974: La Reine du Mal, 1981: La Main du Cauchemar, 1986: Salvador, Platoon, 1987: Wall Street, 1988: Talk Radio, 1989: Né un 4 Juillet, 1991: Les Doors, 1991: JFK, 1993: Entre ciel et Terre, 1994: Tueurs Nés, 1995: Nixon, 1997: U-turn, 1999: l'Enfer du Dimanche, 2003: Comandante (Doc), 2003: Persona non grata, 2004: Looking for Fidel (télé-film), 2004: Alexandre, 2006: World Trade Center, 2008: W.: l'Impossible Président, 2009: Soul of the Border, 2010: Wall Street: l'argent ne dort jamais.

Septs après son curieux premier essai horrifique, Seizure, le néophyte Oliver Stone réalise et co-scénarise en 1981 La Main du Cauchemar, tiré d'un roman de Marc Brandell (auteur largement influencé par Les Mains d'Orlac de l'écrivain français Maurice Renard (1921).
Cette série B méconnue, version modernisée de La Bête aux cinq doigts de Robert Florey (1946) était initiallement prévue pour John Voight mais également Christopher Walken dans le rôle capital, finalement attribuée à l'acteur anglais Michael Caïne.

A la suite d'un terrible accident de voiture, le dessinateur Jonathan Lansdale se retrouve amputé de la main droite après que celle-ci ait été arrachée par la remorque d'un camion. Disparue aux abords d'un champ bucolique, Jonathan est depuis obsédé par la disparition inexpliquée de sa pogne. La relation conjugale conflictuelle avec sa femme le contraint de s'exiler quelques semaines dans une demeure isolée à San Francisco. Peu à peu, jonathan est sujet à des amnésies répétées et d'une conscience perturbée par le sens de sa réalité.

Sorti à l'époque florissante des vidéos-clubs des années 80 dans la catégorie des "inédits vidéo" de Warner Home Vidéo, La Main du Cauchemar est une excellente série B sortant largement du lot traditionnel des films d'horreur conventionnels, concoctés pour effrayer son public juvénile avide de sensations fortes.

Le film débute rapidement par le fameux point d'orgue d'une séquence gore percutante adroitement réalisée dans un montage ordonné et consciencieux. Ce moment clef particulièrement choc et spectaculaire réussit à impressionner dans sa texture réaliste agencée par la magie des effets visuels du grand Carlo Rambaldi.
Passé cet évènement horrifico-tragique d'un homme sauvagement destitué de sa main droite, Oliver Stone choisit le recours à la tempérance pour distiller un climat inquiétant entretenu par un savant dosage de suspense lattent.
Après une bonne demi-heure classiquement éprouvée et que le héros se soit accoutré d'une main artificielle érigée en métal, le film démarre véritablement quand celui-ci se voit contraint de se séparer de sa famille pour s'isoler dans une maison champêtre, éludée de toute population urbaine. C'est dans la région de San Francisco que Jonathan réussit à trouver un poste d'enseignant dans une université spécialisée pour l'art du dessin. Dans cet établissement, il fait la rencontre d'une jeune séduisante élève, aguicheuse et dévergondée.
Régulièrement épris d'hallucinations horrifiques et souffrant d'amnésie, l'homme déchu de ses fonctions de dessinateur inné va peu à peu sombrer dans une folie schizophrène irréversible !
Rendu fou de jalousie par l'infidélité d'une femme lassée d'une vie conjugale convenue et de la relation sexuelle d'une enseignante volage et allumeuse, sa hantise de n'avoir pu récupérer sa poigne substantielle va rapidement le mener dans une rage meurtrière incontrôlée.

Avec l'utilisation graphique d'une main mortifère pernicieuse se faufilant dans les moindres recoins pour se préparer à offenser ses potentielles victimes, La Main du Cauchemar utilise cet élément fantastique débridé afin de matérialiser les visions délirantes d'un homme totalement tributaire de sa folie mentale.
Pour rendre captivante cette sombre histoire savamment entretenue par un habile dosage de suspense angoissant, Oliver Stone se focalise précisément sur la dimension humaine et psychologique du dessinateur incapable de discerner la part de chimère et d'une réalité rationnelle.

C'est grâce à la remarquable prestance de Michael Caïne, endossant le rôle pathétique d'un homme assailli de visions macabres par son esprit torturé (faute d'une main démembrée) que le film réussit à intriguer et passionner sans jamais avoir recours à l'utilisation futile de ficelles balisées ou d'outrance gore. Tour à tour irascible, ombrageux, haineux, violent mais aussi anémique, attendrissant (les rapports fragiles avec sa fille), charmeur et compatissant (la relation amoureuse naissante avec l'étudiante déboussolée), l'acteur anglais réussit admirablement à provoquer une certaine fascination répulsive totalement prégnante dans son étalage d'émotions troublées. Il réussit même à évoquer dans une moindre mesure une certaine empathie déconcertée par cet esprit refoulé voué à la haine vindicative pour culminer vers l'acte criminel.

Débutant sa trame avec un certain rythme langoureux dans la sobre mise en place de l'intrigue, La Main du Cauchemar réussit ensuite honorablement à tirer son épingle du jeu dans un habile dosage de tension sous jacente, d'inquiétude latente et de suspense habilement diffus. Reposant entièrement sur les épaules d'un immense acteur totalement inspiré par son personnage bicéphale, cette petite perle menée avec un indéniable savoir-faire technique rend honneur au genre établi et peut se targuer de figurer dans les meilleures séries B des années 80.