Réalisateur: Harry Kümel
Année: 1971
Origine: France/Belgique/Allemagne
Durée: 1h40
Distribution: John Karlen, Delphine Seyrig, Danielle Ouimet, Andrea Rau, Paul Esser, Georges Jamin.
FILMOGRAPHIE: Harry Kümel est un réalisateur belge, né le 27 Janvier 1940 à Anvers.
1963: Hendrik Conscience. 1965: De Grafbewaker. 1969: Monsieur Hawarden. 1971: Les Lèvres Rouges. 1972: Malpertuis. 1978: Het verloren paradijs. 1985: The Secrets of Love. 1986: Série Rose. 1991: Eline Vere.
Produit entre la France, la Belgique et l'Allemagne, Les Lèvres Rouges est une oeuvre atypique du mythe vampirique auquel Harry Kümel apporte sa touche particulière avec un goût prononcé pour l'esthétisme charnel. Le soin accordé à son imagerie lascive et à ses teintes bleutées d'une nature crépusculaire laissent en mémoire un recueil de plages fantasmagoriques.
Un couple de jeunes mariés louent une chambre d'hôte pour leur voyage de noces. Dans cet hôtel désert, ils font la connaissance d'un étrange couple de femmes et ne vont pas tarder à se laisser séduire.
Si ce film belge peu connu du public est une variante académique du thème du vampire, il est toutefois transcendé par l'inspiration d'une réalisation expérimentale et le talent de son actrice principale, Delphine Seyrig. Sur ce dernier point, on peut vanter que sa présence charnelle y est pour beaucoup au climat envoûtant qui émane de l'intrigue. Le charme de sa voix rocailleuse et surtout le magnétisme accordé à son regard pénétrant nous ensorcellent par sa beauté classieuse. Son esprit mesquin lointainement inspiré de la comtesse sanglante Elisabeth Bathory ne fait que mettre en exergue un caractère de femme désinvolte en quête de sang frais et de jeunes filles prudes.
A partir d'un argument simpliste bâti sur son emprise de séduction et son désir de combler sa solitude, Les Lèvres Rouges s'avère littéralement étrange et surprenant car on ne sait jamais dans quelle direction sa structure narrative souhaite emprunter. En adoptant une démarche érotique explicite ou sous-jacente, et l'aspect parfois sanglant de certaines séquences stylisées (on peut même évoquer l'imagerie baroque de Dario Argento), Harry Kümel nous entraîne dans une forme de rêve fantasmatique où l'amour en désillusion semble difficile à acquérir. L'aspect désincarné et l'attitude indolente des protagonistes renforcent son caractère surréaliste hors norme pour mettre en exergue le pouvoir indiscernable d'une comtesse influente.
Poétique, sensuel et envoûtant, Les Lèvres Rouges est une réussite formelle peaufinant un conte vampirique diaphane à la destinée esseulée. La maîtrise de sa mise en scène auteurisante et le talent des interprètes (notamment la blonde québécoise Danielle Ouimet à la chevelure d'or !) renforcent les ambitions singulières de cet ovni clairsemé.