par SUSPIRIA » 18 Octobre 2010, 12:12
Récompensé du Prix de la critique et du Prix d'interprétation féminine (décerné à Heather Langenkamp) lors du Festival international du film fantastique d'Avoriaz en 1985, Wes Craven ne s'imagine sans doute pas la bombe qu'il vient de créer à travers un nouveau mythe du cinéma imaginaire, une icône mondialement célébrée dans le monde entier par les fans de frissons ludiques et masochistes.
C'est l'ingéniosité de sa trame singulière qui fascine au plus haut point Les Griffes de la nuit ! Une idée génialement exploitée envers ce récit angoissant mené sans temps mort dans une ambiance pesante, qui juxtapose avec habileté part de rêve cauchemardesque et réalité où des adolescents vont être les proies d'un croquemitaine vindicatif, parce que quelques années auparavant, leurs parents auront brulé ce diabolique tueur d'enfant du nom de Fred Krueger !
Dans une petite ville de Californie, Nancy Thompson, Tina ainsi que leurs amis Glen et Rod vont être les témoins et futures victimes d'un étrange évènement improbable. En effet, ces adolescents sereins et équilibrés vont vivre et subir de manière commune le même rêve terrifiant !
Dans leur songe, un croquemitaine au visage défiguré est lancé à leur trousse pour tenter de les tuer un à un !
Cet homme au chapeau, vêtu d'un pull rouge à rayures possède la particularité d'avoir un gant à la main droite, rallongé de longues lames d'acier à la place des doigts.
Quand Tina est retrouvée morte en pleine nuit pendant un sommeil véhément sous les yeux ahuris de son ami Rod, la panique commence à s'installer dans ce paisible quartier au lourd passé cachant un secret parental éhonté.
Avec un scénario aussi pernicieusement imaginé, Wes craven, en pleine possession de son sujet va nous entrainer dans un cauchemar sans fin où rêve et réalité vont souvent fusionner pour mieux désorienter le spectateur fasciné par cette improbable histoire de spectre aux griffes d'acier errant uniquement dans les songes pour poursuivre des adolescents et les tuer dans leur sommeil.
Avec une inventivité sans égale, Craven brouille les rêves illusoires avec une dose massive d'effets-spéciaux prodigieux (qui n'ont pas pris une seule ride aujourd'hui !), d'une grande efficacité dans son inventivité visuelle où toutes les situations impromptues peuvent être matérialisées dans l'illogisme des songes puisque tout devient possible dans l'inconscient imaginaire !
On apprendra également à travers ce thème passionnant que le rêve reste une énigme de notre existence déjà dénuée de sens, son origine restant inconnue et sa raison totalement inerte et infondée.
Robert Englund s'en donne à coeur joie dans le rôle du grand brûlé revanchard, véritable monstre de foire à l'humour noir sarcastique qui se fait un malin plaisir à effrayer ses victimes soumises ainsi que le spectateur embarqué dans un onirisme macabre d'une pâle beauté.
L'acteur prend son rôle inquiétant avec un juste équilibre de sobriété sardonique sans jamais tomber dans la fanfaronnade outrancière ou la blague facile auquel les nombreuses suites mercantiles réduiront son potentiel terrifiant à néant (en dehors du 7è volet salvateur purgé par son créateur !).
Heather Langenkamp impose une jolie prestance dans son jeune âge déjà affirmé par un certain niveau de maturité.
Une jeune fille rendue endurci par le divorce de ses parents et du fait des penchants alcooliques de sa génitrice refoulée.
Cette actrice novice fait preuve d'un vrai tempérament et de caractère autoritaire quand elle se décide à affronter son ultime ennemi dans un final cartoonesque débridé et haletant.
On retrouve avec plaisir notre bon vieux briscard John Saxon dans le rôle du paternel obtu et borné, incapable d'éduquer sa fille ou de gérer une enquête irrationnelle dénuée de raison.
Dans un second rôle, on reconnaitra dans celui du petit ami de Nancy, le jeunot Johnny Depp pour sa première apparition à l'écran, à l'aube de sa riche carrière foisonnée, campant ici avec frivole discrétion un jeune quidam pas très affirmé, un peu en retrait.
Malgré une chute finale incohérente et grotesque, Les Griffes de la nuit reste l'un de ces classiques instantanés des années 80 qui tire son originalité et son pouvoir de fascination par une idée génialement déployée, une sourde ambiance angoissante teintée de poésie morbide, amplifiée par une superbe partition aigue à base de synthé de Charles Bernstein et surtout par la création d'un nouveau personnage charismatique, véritable archétype des plus grandes figures de l'horreur : Fred Krueger (qui deviendra familièrement par la suite Freddy Krueger)
NOTE: L'édition blu-ray est d'une qualité technique renversante !
ANECDOTES: Le film fut interdit aux moins de 18 ans lors de sa sortie en salle au QUEBEC.
C'est Claude Chabrol qui est à l'origine du titre français: LES GRIFFES DE LA NUIT ! Parallèlement à son poste de réalisateur, il travaillait à long terme pour trouver des titres français à des productions américaines.