par BRUNO MATEI » 01 Août 2012, 06:47
Précurseur du film d'infectés (si on élude le pizzaiolo Avion de l'Apocalypse !) et renouveau de la vague déferlante des zombies sous amphétamines, 28 Jours plus tard est le premier volet d'une trilogie post-apocalyptique. S'il doit en priorité son influence à Zombie de Romero, Danny Boyle se révèle suffisamment adroit et intègre pour nous concocter une terrifiante descente aux enfers à la dignité humaine désabusée.
Une association de la cause animale pénètre par effraction dans un laboratoire pour libérer des chimpanzés condamnés à la vivisection. Contaminé par la rage, le premier singe relaxé se jette sur l'un des sauveteurs et le mord violemment au cou.
28 jours plus tard, la plupart des êtres humains ont été enrayés par cette maladie du sang poussant les infectés à s'entretuer avec une rage incontrôlée. Jim, patient hospitalier sorti d'un coma, va rencontrer sur sa route quelques survivants et tenter de résister ensemble à la menace meurtrière.
A partir d'un argument éprouvé (une poignée de survivants tentent de résister à une menace meurtrière dans un pays dévasté), Danny Boyle dénonce dès son prologue social l'embrasement des guerres de religions et la folie de l'homme toujours plus belliqueux à combattre son rival. Avec l'entremise de véritables images d'archives extraites des infos télévisuels, 28 Jours plus tard provoque le malaise à illustrer sans concession le comportement barbare de civils livrés à l'anarchie la plus confuse. Une façon catastrophique à mettre en évidence la violence urbaine en recrudescence avant qu'un primate atteint de la rage ne contamine l'humanité entière vouée à une furie irraisonnée !
Avec une photographie rugueuse exploitée en caméra DV, de manière à mettre en exergue sa facture documentaire, le film de Danny Boyle dépayse allégrement le spectateur plongé dans une ambiance de solitude où un pays tout entier est éludé de sa démographie. Ce climat post apo prédomine avec souci d'authenticité une aura de décrépitude auprès des rares survivants cloîtrés dans des appartements insalubres car abandonnés. Alors que dehors, les cadavres s'amoncellent sous l'allégeance de hordes d'infectés extrêmement agressifs pour courser toute présence humaine. C'est Jim, ancien blessé à peine sorti d'un hôpital vacant qui va établir de façon aléatoire la rencontre d'un père et sa fille, ainsi qu'une femme solitaire particulièrement déterminée. Communément, ils vont décider de s'aventurer vers des contrées inexplorées pour peut-être découvrir un asile plus serein et côtoyer quelques rares survivants.
Avec vulnérabilité, Danny Boyle privilégie un soin humaniste à la densité de ces personnages particulièrement attachants dans leur quête désespérée de daigner survivre dans ce monde chaotique. Pour amplifier ce sentiment d'insécurité sous-jacent, certaines attaques cinglantes perpétrées par les contaminés contre nos héros se révèlent redoutablement efficaces et nous ébranlent dans leurs exactions sanglantes d'une vigueur estomaquante ! La réalisation exploite lestement ce sentiment de peur mais aussi d'isolement anxiogène qui vont planer sur les frêles épaules de nos héros. Bien avant qu'un cortège de militaires extrémistes se résout à les prendre en otage, après les avoir tièdement accueilli dans leur château. Puisque leur intention majeure aura été de daigner féconder les deux uniques survivantes afin de préserver leur éventuelle postérité. En crescendo, la mise en scène préalablement dépouillée de surenchère spectaculaire va déployer quelques scènes d'action et d'horreur particulièrement éprouvantes. En prime, la partition musicale ajustée par le cinéaste en personne ainsi que ses acolytes, Godspeed You, Black Emperor puis John Murphy va largement contribuer à scander son ambiance mortuaire quand nos héros vont tenter de s'opposer à la dictature militaire et déjouer les enragés planqués aux abords du château.
Le scénario efficient et bien construit nous a donc longuement accordé une empathie affectée à la destinée incertaine de nos protagonistes évoluant dans un no man's land précaire. Tandis que son alerte point d'orgue va lever le voile sur les motivations insidieuses de nos militaires vouées à la déchéance primitive et stigmatiser l'avilissement du machisme communautaire en humiliant la femme par l'outrage sexuel.
Si 28 Jours plus tard réussit largement à transcender tous ces ersatz qui ont repris le concept du zombie infecté dans les années successives, il le doit avant tout à la densité humaine de ces personnages remarquablement dessinés. Cette compassion désenchantée est également impartie à son atmosphère élégiaque exploitant à merveille son environnement naturel ou d'urbanisation confinés à l'exode mutique. Alors qu'une frayeur cinglante engagée par des enragés sanguinaires vont relancer la mode du Zombie movie sous amphétamine. Réaliste, âpre et parfois poétique (la traversée des chevaux), ce must du genre sera néanmoins détrôné 5 ans plus tard avec sa suite ébouriffante 28 Semaines plus tard...
