Full Contact symbolise la judicieuse alliance entre le polar hongkongais hérité de l'école de John Woo, Tsui Hark ou encore Johnnie To et le film de Cat III qui se respecte. Ultra-violent à souhait - l'on ne parvient toujours pas à comprendre qu'une telle bande, outre le fait d'avoir été classée dans la catégorie 3, n'ait pas écopé d'une interdiction aux moins de seize ans, du moins par chez nous -, esthétisant jusqu'à la lie, immoral, bête et méchant, voilà ce qui résume grosso modo le contenu du métrage de Ringo Lam. Tout l'ensemble concourt stylistiquement parlant à s'imprégner le plus possible de la culture américaine des années quatre-vingt, que cela soit dans la mise en scène et tous les effets clipesques datés allant avec, dans la photographie sur-saturée, les éclairages on ne peut plus criards et ou trop vifs ou trop opaques, dans les fringues ringardes des personnages et le look des véhicules; exception faite pour une partie de la bande-son, paradoxalement plutôt novatrice en 92, qui carbure à la techno pulsionnelle entre deux riffs de guitare rock eighties.
Prétextant une banale histoire de règlements de compte entre un psychopathe homosexuel et un ancien videur de night-club laissé pour mort saupoudrée d'un soupçon de vengeance et de romantisme déjà cent fois vus et revus,
Full Contact mise tout sur la forme, le tape-à-l'il et le clinquant avec le but insatiable de nous en mettre plein la vue. Et il faut dire que ça marche du tonnerre. Les flingues crachent des balles à n'importe quelle occasion, les corps répondent par des hectolitres d'hémoglobine gisant des trous formés par les impacts, et le couteau de Simon Yam aime à se planter dans le cur d'innocentes victimes qui seraient susceptibles de nuire aux desseins de son maître.
C'est souvent grossier et pas bien cérébral, la nymphomane de service porte des mini-jupes moulantes au possible et ne sort guère une phrase qui ne tienne pas de la pure vulgarité libidinale, et pourtant, la grande pudicité de l'industrie cinématographique locale veut qu'elle ne dévoile pas même l'ombre d'un sein; il en va de même pour la midinette acrobate d'un Chow Yun-Fat quelque peu pâlichon, ne parvenant pas à retrouver la classe du Killer dans la peau du gentil quand même un tantinet méchant et qui se saoule aux verres de Perrier lorsqu'il ne flingue ou ne castagne pas. Anthony Wong déçoit lui aussi, car les rôles de lâches mal aimés lui vont nettement moins bien que les portraits de gros timbré prêt à tout pour humilier, violer, contaminer, découper et fricasser son prochain (
The Untold Story et
Ebola Syndrome). Seul Simon Yam, loin du brave et angélique tueur d'
Une Balle dans la Tête, fait des étincelles dans sa composition de psychopathe gay à la fois impitoyable et très fin.
Full Contact bénéficie d'une mise en scène excellente, nerveuse et dynamique, qui joue sur des travellings fusant et des plans inclinés typiques de Tsui Hark; mais son manque de rythme et ses temps morts (n'est quand même pas John Woo qui veut) le rappellent à son poste, certes déjà fort honorable, de série B. Aussi, ceux qui s'attendent à de l'action quasi non-stop, des gunfights à n'en plus finir et quelque cent morts à la minute comme dans
The Killer et
À toute épreuve risquent légèrement de piquer la mouche, car si le score de refroidissements par poudre et par plomb demeure élevé, et ces derniers filmés de manière très spectaculaire, voire Gore, l'on fait quand même des pauses raisonnables entre deux canardages survoltés.
Full Contact est une bombe; une bombe d'ultra-violence et d'esthétisme hérité des traditions pop-corn US de la décennie (dé)passée, avec parfois même des allures de comédie à la Jackie Chan, mais dont la cruauté impressionne parfois. Franchement fun et barge.
8/10