up!
La compagnie des loups
The company of wolves
Genre: Fantastique
Pays: Etats Unis
Année: 1984
Réalisateur : Neil Jordan
Avec : Angela Lansbury, David Warner, Graham Crowden, Brian Glover...
Si aujourdhui on associe volontiers le genre fantastique au cinéma, il ne faut pas oublier quen Europe sa propagation sest faite via des contes dabords transmis par tradition orale, puis mis par écrits par de célèbres écrivains tels que Andersen, les frères Grimm, Charles Perrault
Ces contes ont presque tous en commun lutilisation récurrente dun bestiaire et dune imagerie fantastique. Ogres, loups et sorcières y apparaissaient régulièrement. Ces figures étaient aptes à stimuler limagination des gens, effrayer les enfants et bien souvent véhiculer une leçon morale
A lorigine de
La compagnie des loups de Neil Jordan, il y a le livre éponyme de Angela Carter. Dans son ouvrage lauteure y détourne le conte bien connu du «Petit chaperon rouge» de Charles Perrault, et livre une véritable uvre subversive qui utilise magistralement la sexualité trouble et sous-jacente du conte.
Mais il ne sagit que dune nouvelle finalement assez courte et donc difficilement transposable en un long métrage. Au départ, cest la chaîne de télévision britannique
Channel 4 qui en acquiert les droit et décide den faire un téléfilm dune heure. Le scénariste Neil Jordan est emballé par le projet et trouve un producteur en la personne de Stephen Woolley, directeur de la firme Palace, spécialisée dans la distribution de films dhorreur en vidéo.
Le film suit donc la trame principale de la nouvelle de Angela Carter, à savoir lhistoire de la jeune Rosaleen, une jeune fille qui, dans son sommeil, rêve quelle est une petite paysanne vivant dans un village désuet perdu au milieu dune forêt. Dans ce village tous les habitants vivent dans la crainte des loups qui dévorent bétail et voyageurs imprudents. Mais la grand-mère de Rosaleen lui conte de terribles histoires où les créatures les plus redoutables sont des loups «avec des poils à lintérieur», grimés en humains
A cette ligne narratrice se greffe dautres histoires annexes, racontées par la grand-mère ou par Rosaleen elle-même, et mettant toutes en scènes des loups-garous
La compagnie des loups ne fait quemprunter son histoire aux comptes, il leur prend aussi toute leur imagerie. Ainsi le film se déroule dans une forêt enchanteresse et surréelle, entièrement reconstruite en studio par Anton Furst (déjà lauteur des décors vu dans
Alien de Ridley Scott). Le village et ses maisons cossues de pierres et de bois sont aussi reconstruits en studio. Ceci contribue à renforcer le caractère onirique et fantastique du film.
De même, le film nest pas avare en effets spéciaux, et sur ce plan il se veut alors le digne successeur des révolutionnaires
Le loup-garou de Londres et
Hurlements sorti quelques années plus tôt. Ces deux films avaient impressionné par le recours à des techniques deffets spéciaux alors nouvelles ou peu usitées comme les maquillages et surtout les effets danimatroniques qui permettaient de montrer les différentes étapes des transformations en loup de manière beaucoup plus réaliste.
Hélas toutefois, si les effets de
La compagnie des loups impressionnaient à lépoque de sa sortie, force est davouer quaujourdhui ils paraissent relativement vieillis. De même pour les décors de studios, qui sont certes relativement charmants, mais qui manquent cruellement dampleur.
Enfin, le film de Jordan nhésite pas non plus à reprendre les thèmes chers à Angela Carter, à savoir le détournement de comptes et lérotisme. Ces thèmes sont surtouts abordés lors du passage sinspirant directement du Petit chaperon rouge. En effet le conte de Perrault, de même que toutes les histoires racontées par la grand-mère dans le film, avait pour but de mettre en garde les jeunes filles contre les caractères virils (les poils) et «sauvages» attribués à la gent masculine, ainsi que contre la sexualité en général. Cest là que le détournement dAngela Carter devient très habile, puisque Rosaleen est attirée par les loups, et finira par les suivre de son plein gré. En clair, la jeune femme se libère ici des pulsions inhibitrices inculquées par la grand-mère, et suit les loups
La compagnie des loups offre une lecture beaucoup plus adulte et actuelle des contes de fées en somme. Cependant le recourt parfois abusif à ces symboles parfois lourds et inopportuns pourra rebuter certains spectateurs. De même, la narration éclatée qui se perd parfois en histoires annexes dun intérêt parfois purement visuel, nuit finalement au film.
En somme
La compagnie des loups était une tentative audacieuse et originale de traiter du mythe des loups-garous, mais le film souffre hélas de trops de défauts de rythmes et de scénario pour être véritablement réussi.