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[BRUNO MATEI]

CHRISTMAS EVIL
Titre d'origine: You Better Watch Out
Réalisateur: Lewis Jackson.
Année: 1980.
Origine: U.S.A.
Durée: 1H40.
Distribution : Brandon Maggart, Jeffrey Demunn, Dianne Hull, Andy Fenwick, Brian Neville.

FILMOGRAPHIE: Christmas Evil est le premier et unique long métrage du réalisateur américain Lewis Jackson.

L'ARGUMENT: Un homme, obsédé par le Père Noël, devient un serial killer en puissance qui détermine qui n'a "pas été sage"...

MERRY CHRISTMAS ou LE NOEL DES ENFANTS SAGES.

Parce que 30 ans auparavant, au soir d'un réveillon, il avait été traumatisé d'épier en cachette un père noel (en faite son père) pratiquer des attouchements sexuels sur sa mère, un homme solitaire travaillant dans une fabrique de jouets décide à la période de Noël de rendre ses lettres de noblesse pour cette fête catholique de manière vindicative.

Précurseur de la médiocre série des Silent Night, deadly night, Lewis Jackson réalise quatre ans auparavant cette curieuse série B horrifique à l'ambiance particulièrement étrange auquel certains fans lui vouent un véritable culte après quelques décennies écoulées (John Waters le considérant comme le meilleur film de Noel jamais réalisé !).

Christmas Evil est une petite oeuvre modeste qui réussit à surprendre de manière sarcastique sans jamais chercher à concourir pour être le plus sanglant ou terrifiant possible (il n'y aura que 2 meurtres après tout). Il prime plutôt sur des idées inventives teintées d'humour noir, sur une ambiance lourde et pesante accentuée par une partition musicale dérangeante à travers le portrait pathétique d'un homme brimé par ses collègues de travail, considérablement obsédé par la magie de Noël suite à un traumatisme infantile.
Exception faite que de nos jours, cette cantique traditionnelle célébrant la naissance de Jésus s'en trouve désacralisée de manière néfaste par une société de consommation davantage indocile et perfide dans ses ambitions lucratives.
C'est aussi la qualité primordiale de cette satire non dénuée de quelques défauts de cohérence (la tentative d'étouffement du père de famille allongé dans son lit juste à côté de sa femme semi endormie est invraisemblable et grotesque) que de dénoncer une société commerciale expansive qui ne recherche qu'à rameuter le chiffre d'affaire le plus fructueux.

Par des situations et revirements inattendus qui laissent contribuer une imagination fertile et sardonique, Christmas Evil tire son épingle du jeu dans une succession de scènes dramatiques induites dans la farce méchante et la dérision.
Comme le fait par exemple que notre tueur motivé tentera en vain de passer par une cheminée trop étroite pour surprendre ses propriétaires endormis. Ou cette scène impensable dans un commissariat avec cette parade folklorique de gentils pères noël alignés devant l'auditoire, obligés de s'exclamer à haute voix un "Merry Christmas" poussif et élogieux !
Il y a également une séquence festive dans une salle de réveillon bondée d'une centaine d'invités quand notre père noël vindicatif mais convaincu de sa devise va avertir devant une rangée d'enfants fascinés qu'il leur fera subir des choses horribles s'ils n'auront pas été sage durant la nouvelle prochaine année. Les parents médusés et décontenancés de cette révélation éhontée ne sauront pas s'il faut en rire ou s'inquiéter avant que notre tueur camouflé libère un rire moqueur et rédempteur.
Autant vous prouver que Christmas Evil n'est pas avare à ce type de situations incongrues comme le fait que des enfants fascinés par la générosité du père noël avec ces offrandes promises se décideront à le protéger contre l'autorité parentale parce que l'un des pères, armé d'un couteau, se décidera à le provoquer après avoir reconnu l'habit insalubre de cet imposteur.

Brandon Maggart interprète avec un physique lambda un rôle inquiétant dans son accoutrement de Santa Claus pernicieux, justement convaincant dans ses états d'âme torturés, pathétique dans sa quête improbable d'offrir à ceux qui l'ont mérité un florilège de cadeaux de noël répartis à l'arrière de sa camionnette (Harry étant persuadé que son véhicule fait office de traineau magique !)
Avant sa virée meurtrière hasardeuse, il faut le voir pouffer de rire de manière fébrile et malsaine, se regardant devant sa glace après s'être pouponné le menton d'une mousse à raser voluptueuse pour s'imaginer ironiquement que la barbe du père noël lui sied à merveille !

Après que le frère du coupable ait tenter inconsciemment un acte effronté dans une scène cynique (faussement) dramatique, le final poétiquement libérateur s'achève sur une note fantastique que personne n'attendait alors que la population locale a entrepris de faire la peau à notre personnage légendaire. Le lynchage ancestrale est rendu si extravagant qu'on se croirait revenu au temps de Frankenstein quand ces habitants du quartier se muniront de torches flambées pour courser et annihiler leur meurtrier démasqué.
Ce final exutoire totalement inopiné se permet une tonalité onirique pour clôturer ce portrait empathique d'un tueur pathétique qui ne demandait qu'à aimer et protéger les enfants de l'influence du Mal.

LE PERE-NOEL A LES BOULES.
Déterré de l'oubli grâce au dvd commercialisé par la revue Mad Movies, Christmas Evil est à reconsidérer et se doit d'être réévalué à sa juste valeur (nonobstant quelques menus défauts comme son montage approximatif et un début qui peine à captiver) dans sa compétence à offrir intelligemment une série B imaginative et décomplexée, à la gouaille intempestive.
Un cadeau de noël de fin d'année gentiment recommandable.

NOTE: Christmas Evil est aussi connu sous le titre You Better Watch Out qui n'est autre que la première phrase d'une comptine de Noël intitulée "Santa Claus is Coming to Town".