
Ecrit par Hélène Cattet & Bruno Forzani
Avec Marie Bos , Delphine Brual , Harry Cleven , Bianca Maria D'Amato , Cassandra Forêt , Charlotte Eugène Guibeaud , Bernard Marbaix et Jean-Michel Vovk
Année : 2010
Pays : France
Durée : 90 min
.: L'HISTOIRE
Une petite fille effrayée par une villa trop silencieuse.
Une adolescente attirée par de mystérieuses présences rôdant dans son village.
Une femme qui revient défier ses fantômes sur les lieux de son enfance.
Les trois âges clés de la vie tourmentée d'Ana. Entre désirs, réalité et fantasmes.
.: LA CRITIQUE
S'il y a une chose qu'il faut mettre au clair avant de commencer, c'est que "AMER" n'est Pas un Giallo.
Voila c'est dit. Un peu comme le "Canada Dry" (référence pour les vieux), ça a le gout du Giallo, la Couleur du Giallo, mais ce n'est pas un Giallo. "AMER" est plus proche du film d'auteur expérimental ou du projet "Arthouse" que du Thriller. C'est dans cet état d'esprit qu'il faut le voir de peur d'être surpris ou déçu, si on en croit une promo assez mystérieuse sur le sujet.
Évidement les deux réalisateurs en fans invertébrés (c'est volontaire) rendent un hommage à tout ce pan trop méconnu du ciné rital, il en emprunte les codes visuels, les scènes et les thèmes habituels pour en faire les uniques vedettes d'un spectacle émotionnel en bannissant toute narration et considérations scénaristiques.
Oui le film est réellement beau par endroits, et si je suis admiratif de cette tentative de mise en abîme du genre, je le suis beaucoup moins sur la manière.
Après une première partie intrigante, on se perd dans les méandres du vide, avec de longues scènes inutiles et la surabondance d'extrêmes gros plans devient vite lassante et facile et on déconnecte d'une histoire qui ne va nulle part.
Le problème est que l'overdose de gros plans donne l'effet inverse de celui prévu au départ. Ils ne soulignent plus rien et se résument à un patchwork d'images en perdant tout leur sens. On pense aux premiers Kenneth Anger par exemple. Mais le but ici étant ici de faire ressentir plus que de voir, ce procédé a eu sur moi l'effet inverse, et l'inexpression de certains acteurs parfois n'a rien fait pour arranger les choses.
De même le choix de mettre un fond sonore "industriel" avec des nappes incessantes façon film expérimental "type" (depuis "ERASERHEAD" de Lynch surtout) n'est pas novateur et cela rend l'intrusion des musiques originales de l'époque complètement gratuites voir déplacées et annihile tout leur potentiel poétique. Une cohérence sonore aurait tellement rendue le tout plus homogène et aurait pu nous faire partir dans le trip ultime tant espéré.
Si on sent bien l'amour du genre (que je partage) à travers cette expérience, on se demande pourquoi n'avoir pas été un plus loin dans la recherche des situations qui le caractérise.
Par exemple, il n'y a qu'un seul meurtre vers la fin (et encore, mais bon je ne peut en dire plus...), alors que c'est tout de même la composante majeure du Giallo. De même que le sexe est ici franchement éludé, bien que l'héroïne adolescente de la deuxième partie semble découvrir son corps et la réaction des hommes à son égard, nous n'auront droit qu'à quelques gros plans de genou, de cheville, de poignet ou de jupe au vent bien gentilles en comparaison des classiques des seventies. Les protagonistes des gialli étaient également tous des crapules et des types louches, ce qui en faisait des coupables en puissance, et c'était la marque de fabrique de ce type de Thriller. Ici on ne retrouve pas cette ambiance un peu malsaine et les gros plans trahissent souvent un manque d'émotion plus que d'en apporter. C'est un système à double tranchant.
Le choix de renier tout semblant d'histoire au profit des fantasmes d'Anna est trop évocateur de "RéPULSION" et de ses succédanés. Lynch ou Bunuel n'ont pas eu besoin de justifier leur univers par une quelconque maladie mentale ou imaginaire d'un personnage. C'est ce qui rend le plus étrange et encore plus affirmé. On l'accepte ou pas.
Vous l'aurez deviné, je n'ai pas accroché à "AMER" et pourtant je ne peut pas le haïr pour autant.
De la même manière je ne vous déconseillerais pas de vivre cette expérience, qui sera sans nul doutes vécue différemment par chaque spectateur selon sa sensibilité, sa connaissance du genre ou ses gouts cinématographiques.
Cette critique a surement été l'une des plus dures à faire pour moi, car j'attendais beaucoup de celui ci, peut être trop, et je n'avais pas envie d'écrire de mal d'une tentative audacieuse comme celle la.
Le pari était osé à tous les points de vues et Hélène Cattet et Bruno Forzani ont accouchés d'une uvre atypique et iconoclaste dans le paysage du cinéma mondial (oui carrément) et c'est déjà énorme.
Qu'on l'aime ou non, on ne pas nier que des images restent gravés dans votre mémoire et qu'il a au moins le mérite de nous faire réfléchir sur ce que l'on vient de voir.
Note de ottorivers : 5 sur 10
Critique du film "AMER"